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Résumés des articles du n°101

mars 2004


Eric TOURRETTE, D'un fantastique considéré comme forme. Autour d'"Apparition" de Maupassant, 101, p. 14-17

L’étude de la scène centrale d’une nouvelle de Maupassant, “ Apparition ”, est l’occasion de dégager expérimentalement quelques traits constitutifs d’une écriture propre au genre fantastique, et plus précisément à cette forme particulière de fantastique qu’ont surtout pratiquée les écrivains du XIXe siècle et qui repose sur l’hésitation. Trois procédures principales, qui se réalisent concrètement de multiples façons, contribuent surtout à l’émergence de cette tonalité spécifique : l’amplification, la confusion, l’esquisse. Le sentiment d’appartenance générique n’est donc pas purement intuitif, et ses modalités concrètes peuvent être repérées. Ainsi décrite, cette forme de fantastique apparaît comme stylistiquement ambiguë, puisqu’elle emprunte ses effets aussi bien à de spectaculaires surenchères qu’à des suggestions infiniment subtiles.



Il commento dell’episodio centrale d’una novella di Maupassant, “ Apparition ”, è l’occasione d’avvistare empiricamente qualche caratteristica d’uno stile proprio del genere fantastico, e più precisamente quella specie particolare di fantastico che hanno soprattutto usata gli scrittori dell’ottocento e che posa sull’esitazione. Tre procedimenti principali, che appariscono concretamente in molti modi, contribuiscono soprattutto alla comparsa di quel tono specifico : l’amplificazione, la confusione, l’abbozzo. Quindi l’identificazione del genere non è solo intuitiva, indizi concreti possono essere rintracciati. Così descritto, lo stile di quella specie di fantastico si rivela ambiguo, giacché attinge i propri effetti insieme da spettacolose esagerazioni e sottilissimi suggerimenti.


Frédéric CALAS - Nathalie ROSSI-GENSANE, Les construction "Il est x, c'est x, cela" dans le deuxième dialogue de Rousseau juge de Jean-Jacques, 101, p. 28-34

Après avoir discriminé le présentatif et la séquence démonstratif + copule, nous nous intéressons aux contrastes c’est vs il (elle) est (+ Déterminant) + Nom, c’est vs il (elle) est + Adjectif dans le Deuxième Dialogue de Rousseau juge de Jean-Jacques. Il s’agit, en s’appuyant sur un texte littéraire, de prendre en compte la fréquence de ces constructions (par exemple, trouve-t-on, selon le terme de I. Tamba, des " substantivations classifiantes " de l’adjectif, du type c’est un orgueilleux ?). Nous envisageons également l’insertion de ce au-delà du cadre phrastique, en soulignant, pour certaines occurrences, la charge axiologique particulièrement affirmée dont se colore l’adjectif les complétant. Puis, dans une perspective allant de la description morpho-syntaxique à l’analyse stylistique, nous montrons le rôle stratégique que joue ce dans l’élaboration d’une dynamique dialogique au service d’une argumentation judiciaire et épidictique.


Cécile NARJOUX, " ces rencontres périssables " : L'absence d'article ou la référence en question dans la poésie de Jaccottet, 101, p. 40-43

L'usage des déterminants chez Jaccottet ne peut manquer d'être fort intéressant au regard des tensions qui animent sa poétique. Dans une étude qu’il consacre à la poésie d’Yves Bonnefoy, il dit préférer les articles indéfinis aux définis dans sa tentative de saisir la vérité du particulier loin de tout emblème, à la fascination duquel cependant lui-même n'échappe pas dans sa poésie. Il ne peut pourtant que se heurter au constat d'inconnaissable que véhicule tout substantif actualisé par l'indéfini, nécessairement partiellement identifié, alors qu'au contraire l'article défini lui permet de rêver à la présupposition d'existence de l’objet évoqué.

Dans cette perspective, quel rôle est joué par l'absence d'article dans la poésie de Jaccottet ? Par là, nous n’entendons pas " l’absence de déterminant dans une phrase ", ce qui " est une irrégularité du français ", mais, partant donc du principe que tout substantif est régulièrement précédé d’un déterminant, " le déterminant vide " qui, comme tel, (…) " doit entrer dans le système de détermination du français ". Cette absence d’article remarquable chez Jaccottet signifie-t-elle seulement que le nom ne fonctionne qu’en emploi intensionnel et sans aucune relation au particulier ? Il va de soi qu’au-delà de son emploi dans des circonstances syntaxiques virtualisantes, chez un poète aux prises constantes avec le réel et sa représentation, une telle idée doit être nuancée et peut être invalidée. Pour ce faire, nous avons donc choisi d’ordonner notre étude selon le degré plus ou moins fort de la détermination référentielle qui marque le nom lorsqu’il n’est précédé d’aucun déterminant.